L’investigation, victime inattendue de la crise du Covid à France Télévisions. Pièces à Conviction, qui consacrait son dernier numéro à la gestion de la crise sanitaire dans les EHPAD, n’aura pas droit à la réanimation : le magazine d’investigation, qui remplissait pourtant parfaitement sa mission d’informer sans céder aux pressions ou à l’autocensure, vient d’être tout simplement enterré. La raison officielle : aller vers « un journalisme dit de solution ». Comment ne pas y voir plutôt la dissolution de ce qui éclaire le citoyen qui – rappelons-le – paye la redevance et dispose d’un droit fondamental : celui d’être informé.
L’investigation ne semble plus être la priorité de France Télévisions alors que l’expérience des médias scandinaves prouve que c’est justement ce type de journalisme qui crée l’adhésion et génère de l’activité sur le numérique.
Ce choix est donc d’autant plus étonnant de la part d’une Direction qui prétend mettre l’audience numérique au cœur de sa stratégie.
Autre aberration : à l’heure où les contenus numériques s’appuient de plus en plus sur le son, où l’usage des podcasts explose, la Direction de France Télévisions décide brutalement de supprimer les emplois des illustrateurs sonores.
Dans sa communication aux élus, la Direction de l’information ne semble pas s’inquiéter de la perte de ce savoir-faire, de ces compétences uniques qui donnent un ton et de l’originalité à nos contenus dans un univers de plus en plus concurrentiel. La technologie est censée faire l’affaire. On imagine aisément le résultat.
En revanche, il y a une conséquence que l’on mesure d’ores et déjà, c’est l’impact sur les salariés. A chaque fois que la Direction a fait le choix de la technologie, celle-ci s’est accompagnée de suppression de postes, de surcharge de travail associée à de la perte de sens et de santé.
La même logique est en place dans plusieurs secteurs de l’entreprise, c’est le cas notamment au CDE, Centre de Diffusion et d’Echanges, où le projet technologique a été défini avant même de s’intéresser au devenir des équipes, qui voient leur emploi percuté par cette transformation.
Car c’est bien de cela dont il s’agit. Les considérations économiques l’emportent sur l’humain.
Comment la Direction entend-elle faire adhérer les femmes et les hommes de cette entreprise à un projet qui les exclut, les renvoyant bientôt à un rôle d’automate ?
Pour l’UNSA FTV, il n’est évidemment pas question de contester la nécessaire évolution technologique, mais de veiller à ce que le progrès annoncé ne serve pas de prétexte à la réduction de la masse salariale.
L’automatisation, les algorithmes et l’intelligence artificielle doivent servir à développer nos capacités et gagner en qualité de travail. Finalement, nous allons vers l’appauvrissement des contenus, la précarisation des métiers et l’uniformisation des flux.
Pas évident que cela soit le meilleur chemin pour résister dans un contexte de défiance à l’égard des médias, d’atteintes à la liberté d’information par le pouvoir exécutif qu’illustrent plusieurs articles du projet de loi « sécurité globale ». L’avenir nous le dira !